Les plastiques biodegradables
 

Mater-Bi

Depuis le 1er janvier 1998, les couverts proposés aux clients de la chaîne de restauration rapide McDonald’s, en Autriche, sont en effet fabriqués en MaterBi, un polymère à base d’amidon de maïs, biodégradable en quelques mois. Plus besoin, en situation de compostage, de séparer ces ustensiles des hamburgers et autres restes des plateaux.

Le Mater-Bi, matériau développé depuis plus de dix ans par l’italien Novamont, ancienne filiale du groupe Montedison, a certes des propriétés mécaniques inférieures à celles des plastiques synthétiques habituels, mais elles suffisent pour l’usage unique qui est fait des assiettes, couteaux et fourchettes dans les McDo. Ce matériau se dégrade en moins de six mois tout en restant stable avant l’utilisation. Les ustensiles, environ deux fois plus chers que ceux en polystyrène, présentent cependant l’intérêt de donner une image « écolo » à la chaîne de fast-food.

APL

En France, Fiberweb, entreprise alsacienne filiale du groupe britannique BBA, propose des nontissés pour couches-culottes en partie fabriqués avec des polymères à base d’acide polylactique (APL), dérivés du blé ou du maïs et commercialisés par le finlandais Neste.

En Allemagne, c’est Danone qui se lance dans le biodégradable, avec des pots de yaourt eux aussi en plastique APL. Le procédé de fabrication, mis au point par Cargill, part du dextrose de betterave ou de maïs, qui, par fermentation, se transforme en un acide lactique, qui est ensuite polymérisé.

Dow Chemical s’est joint à Cargill, en novembre 1997, pour lancer le joint-venture Cargill Dow Polymers, spécialement dédié à ce développement Cette société s’apprête à construire une usine d’un tonnage de 130 000 tonnes qui transformera du dextrose de maïs à partir de 2001 aux Etats-Unis. Une capacité de production qui devrait réduire de deux tiers le coût de ce plastique, encore à plus de 20 francs le kilo aujourd’hui. Ensuite, ce sera probablement l’Europe, avec du sucre de betteraves.

Les plastiques biodégradables reviennent sur le devant de la scène après bien des vicissitudes. Ils se sont développés au début des années 70 à l’occasion des recherches effectuées pour trouver des substituts au pétrole. Puis, avec les cours du pétrole à la baisse, ces développements se sont révélés infructueux. On a vu notamment des granulés à base de maïs vendus 70 francs le kilo, soit cinq fois plus chers que des polymères qu’ils étaient censés remplacer, comme le PE ou le PP. Des matériaux nouveaux dont les avantages étaient souvent trompeurs : ils étaient seulement biofragmentables, donc polluants, car associés à des plastiques synthétiques qui, de fait, ne pouvaient pas être récupérés pour être recyclés.

Biopol ou Cartes bancaires dérivées du blé ou de la betterave

Les plastiques de la génération suivante, comme le Mater-Bi ou le Biopol, développé dans les années 80 par le chimiste britannique ICI, échappent à cette critique. Le Biopol, qui a été acheté par Monsanto il y a deux ans, est un polymère PHB (hydroxybutyrate) produit par fermentation de sucre de blé ou de betterave. Contrairement à la plus part des plastiques dérivés de l’amidon, il offre des qualités mécaniques voisines de celles des plastiques les plus courants.

Après trois années d’approche, Monsanto a même convaincu deux banques, britannique et brésilienne, affiliées à l’organisation écologiste Greenpeace, de substituer du Biopol au PVC dans les cartes bancaires. Dans des conditions de compostage optimales, elle se biodégrade en douze semaines.

Le bioplastique de Monsanto est cependant dix fois plus cher que les PE ou PP qu’il pourrait concurrencer, ce qui explique son emploi limité à des objets aussi peu volumineux que des cartes de crédit. Son procédé de fabrication par fermentation requiert en effet d’énormes investissements. Parfois désigné comme le Microsoft de la programmation génétique, Monsanto travaille actuellement sur des plantes transgéniques qui pourraient synthétiser le PHB.

Des gènes pour métaboliser les sucres en plastique

L’idée est d’identifier les gènes qui incitent les bactéries alcaligènes à métaboliser en plastique les sucres. Ces gènes sont ensuite injectés dans des cellules de plantes. Monsanto a d’ores et déjà réussi à fabriquer du plastique en laboratoire à partir de végétaux comme la moutarde, le colza ou le soja. Mais le polymère ainsi obtenu représente moins de 5 % du poids des plantes, alors que, pour que le procédé soit rentable, il faudrait obtenir 20 % au moins.

Les règlements antipollution poussent aujourd’hui d’autres grands groupes chimiques à s’intéresser eux aussi aux biodégradables. En France, par exemple, à partir de 2002, les décharges devront recueillir uniquement les déchets ultimes, neutralisés et réduits. Du coup, les fournisseurs traditionnels de plastiques proposent à leur tour des matériaux issus de la chimie de synthèse, persuadés que la biodégradabilité n’est pas nécessairement liée à une source biologique. Le principe : créer des polymères dont les chaînes moléculaires présentent des « points faibles » susceptibles d’être brisés par des bactéries.

Bayer a, par exemple, lancé l’été dernier un plastique BAK (Biologisch Abbaudare Kunststoffe), pour moulage par injection, deux ans après son premier « polymère biodégradable » pour l’extrusion de feuilles. Travailler dans le biodégradable peut sembler paradoxal pour un groupe qui développe des matières plastiques techniques et durables. Ces nouveaux produits sont élaborés à partir de polyestéramides et présentent des caractéristiques comparables à celles de nombreux polyéthylènes. Habitué des productions à gros volumes, comme Dow Chemical, Bayer compte les commercialiser sans donner d’indications sur les prix et sur les résidus éventuels.

Les promoteurs de polymères à base végétale comptent, en attendant, occuper des créneaux de marché et convaincre leurs clients sceptiques quant à la biodégradabilité totale des plastiques issus de la pétrochimie.

Remplacer 10 % des plastiques actuels

Des laboratoires continuent d’explorer de nouveaux horizons, comme la fabrication de films en plastiques biodégradables - à partir de graines de coton, par exemple. Ainsi, les films obtenus par le Cirad, centre de recherche agronomique public, établi à Montpellier, présentent des propriétés fonctionnelles intéressantes. Une bonne résistance à la rupture et une faible solubilité dans l’eau, qui pourraient être utilisées dans les films de paillage. A terme, environ 10 % des polymères synthétiques pourraient être remplacés par des matériaux biodégradables. La société Roverc’h établie à Crosne (Essonne), spécialisée dans le transport et le recyclage de béton, commercialise depuis quelques mois un plastique à base d’amidon de seigle, le Polymat, d’origine est-allemande.

Le succès des plastiques biodégradables dépendra de l’efficacité de leur compostage, qui nécessite toute une infrastructure pour contrôler le procédé en termes d’humidité et d’attaque par des microorganismes. Il dépendra également de l’aptitude des fournisseurs à proposer des matériaux résistants et bon marché.

Distinguer compostage et biodegradabilite

Le compostage est un processus naturel par lequel les déchets organiques, aliments et végétaux, se transforment en humus. La biodégradabilité n’implique pas nécessairement un compostage. Des intérêts divergents existent, dans ce domaine, entre les grands groupes chimistes et les entreprises, généralement de plus petite taille, qui travaillent sur des procédés à base de ressources «biorégénérables», c’est-à-dire renouvelables dans un cours laps de temps.

La biodégradabilité des polymères s’effectue en situation de compostage, dans des conditions particulières d’humidité, de température et de vie bactériologique. Certains plastiques d’origine végétale sont fournis également en alliage avec des polymères synthétiques.

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