Les facteurs nuisant à la QV des patients atteints de coronaropathie
 

Plusieurs facteurs nuisent à la QV et il importe de traiter ces variables dans toute étude de la QV. Ces principales variables sont la dépression, l'anxiété et l'existence d'autres maladies ou affections sous-jacentes. Il importe d'envisager ces facteurs pour planifier et gérer les soins aux patients et en particulier pour planifier des programmes de réadaptation cardiaque. Il existe d'autres facteurs pouvant nuire à la QV en rapport avec l'environnement et les déterminants sociaux de la santé (Lee et Carrington 2007).

Au cours de la dernière décennie, la prévalence de la dépression a été fréquemment signalée et il est maintenant démontré que la dépression constitue un important facteur de risque associé à la coronaropathie. Les estimations du pourcentage des patients atteints de coronaropathie qui vivent des symptômes dépressifs varient entre 10 et 40 % (Ruo et coll. 2003, Sheps et Shepard 2001). La dépression constitue un facteur de risque primaire et secondaire de mortalité et de morbidité des patients atteints de coronaropathie et ne dépend pas de facteurs de risque classiques comme le tabagisme, l'hypertension artérielle et la dyslipidémie. Les directives recommandent que tous les patients atteints de coronaropathie soient évalués pour la dépression (Lichtman et coll. 2008).

La dépression présente une forte corrélation avec la présence de l'angine dans une population atteinte de coronaropathie (Frasure-Smith et coll. 2005) et la gravité de l'angine est liée à la QV (Pocock et coll. 1996). Une autre étude a démontré que l'angine est une variable prédictive d'une plus mauvaise qualité de vie liée à la santé du point de vue émotionnel, physique et social, ainsi que d'un niveau plus élevé de dépression selon le questionnaire SCL-90 (Gravely-White et coll. 2007). Les auteurs notaient que lors d'un suivi de six semaines, les patients atteints d'angine mentionnaient une QV considérablement plus mauvaise. Il est évident que les symptômes de l'angine chez les patients atteints de coronaropathie nuisent à la qualité de la vie et l'existence de dépression ou de symptômes dépressifs nuit sensiblement à la QV.

Quant au fardeau de la maladie, la présence de dépression chez les patients atteints de coronaropathie est associée à une augmentation de l'utilisation des soins de santé et à des taux d'hospitalisation et de visite à l'urgence plus élevés (Jiang 2008). La plupart des études se sont attardées sur les dépressions majeures diagnostiquées cliniquement, mais il existe des preuves pour appuyer les effets chez les patients des symptômes dépressifs autodéclarés. De faibles degrés de symptômes dépressifs peuvent permettre de prévoir le risque de coronaropathie. Une des conclusions intéressantes de ces études concerne l'importance de l'autodéclaration et celle-ci mérite d'être examinée. Une étude a démontré que la perception du patient de son état de santé cardiaque est un facteur prédictif indépendant de la mortalité à long terme chez les patients atteints de coronaropathie (Spertus et coll. 2002). Une plus forte perception du fardeau de la maladie est aussi déclarée chez les patients déprimés comparativement aux patients non déprimés (Ruo et coll. 2003). Une étude a démontré qu'un manque d'amélioration fonctionnelle chez des patients déprimés six mois après une chirurgie cardiaque illustre une dépression touchant la santé physique et la capacité fonctionnelle autant que la santé mentale. On recommande généralement une meilleure évaluation psychologique des patients subissant une intervention de pontage aortocoronarien par greffe et une meilleure gestion de ceux qui présentent des symptômes dépressifs mettant l'accent sur l'amélioration de leur qualité de vie après la chirurgie (Goyal et coll. 2005, Mallick et coll. 2005, Hofer et coll. 2006). On prescrit couramment des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) pour traiter la dépression qui sont efficaces dans la réduction des symptômes et sécuritaires sur le plan pharmacologique. Cependant, il n'y a pas de consensus concernant la manière optimale de traiter la dépression chez les patients atteints de coronaropathie selon trois grandes études ayant examiné l'utilisation des antidépresseurs chez les patients présentant une dépression majeure (SADHART, ENRICHD et CREATE).

On a aussi analysé l'anxiété en tant qu'état psychologique en relation avec la coronaropathie, mais le nombre de données probantes est insuffisant. On indique une prévalence de l'anxiété chez les patients atteints de coronaropathie de 36 % et de 45 % dans le cas des troubles de l'anxiété présents tout au long de la vie. Certaines études ont signalé un lien entre l'anxiété et le développement et la récidive de la coronaropathie (Shen et coll. 2008, Todaro et coll. 2007, Lavie et Milani, 2004). On a signalé chez des patients de coronaropathie une forte prévalence d'anxiété généralisée et des symptômes d'anxiété variant de modérés à graves (Lavie et Milani 2004). Une étude longitudinale de 12 ans a confirmé l'importance de l'anxiété dans les cas d'IDM (Shen et coll. 2008). Dans l'étude Normative Ageing Study, on a établi que l'anxiété était un facteur prédictif d'IDM chez les hommes de plus de 60 ans. Bien qu'il faille tenir compte d'un grand nombre de variables semant la confusion lorsqu'on étudie le rôle de l'anxiété dans la coronaropathie et des événements découlant de la coronaropathie, il existe des preuves pour soutenir que l'anxiété constitue un facteur de risque indépendant pour les patients atteints de coronaropathie.

Enfin, la présence d'une maladie comorbide a un effet sur la QV des patients atteints de coronaropathie. Tel que souligné par Netuveli et coll. (2005), il peut exister une augmentation par un facteur quatre de limitation fonctionnelle chez les patients atteints d'affections chroniques et il apparaît important que les professionnels de la santé réalisent l'effet négatif d'une maladie chronique sur la QV. Chez les patients atteints de coronaropathie qui ont subi une intervention de pontage aortocoronarien par greffe et qui avaient une maladie comorbide, il existait beaucoup plus de symptômes (angine et essoufflement) et un taux plus élevé d'IDM avant et après l'opération (Lee 2009). L'étude signalait aussi que la majorité des patients perçoivent leur qualité de vie comme bonne cinq ans après l'opération, bien que la présence de maladie comorbide ait un effet négatif sur la QV physique (Lee 2009). Sawatzky et coll. (2005) ont constaté que les patients atteints d'une maladie chronique ont tendance à faire moins d'activité physique, ce qui peut détériorer leur QV physique et aggraver des problèmes comme l'immobilité et la douleur. Le défi semble résider dans l'équilibre entre les symptômes de maladie chronique des comorbidités et la maximisation des avantages des interventions cardiaques. La coronaropathie est une maladie évolutive et bien que les procédures cherchent à en soulager les symptômes, elles ne la guérissent pas. L'importance du suivi et de la gestion des autres affections comorbides est essentielle pour maximiser la QV physique.

Le défi pour les professionnels de la santé est d'évaluer les patients, de reconnaître et de traiter ces variables qui peuvent parfois semer la confusion et de finalement améliorer la QV du patient. En fin de compte, une question demeure : « comment peut-on réaliser cela? »